Palm Sunday

Palm Sunday today. A few rooms are empty at the place. On a crucifix in one of them, a dry twig of boxwood. The television is on, with ads for soaps, cars, promises of health and wealth. We eat, talk a bit, walk, sit, touch. Hosanna filio David.

Désenchantement du monde et disparition des dieux: Hölderlin mieux que Schiller préfigurerait un mouvement général à étudier en détail (et j’espère que c’est déjà fait). Je pense aux mouvements de l’âme de l’enfant qui, au retour de la messe du dimanche des Rameaux, plantait ses brins de buis bénit dans la mousse des talus à l’entrée des champs. Se les réappropriait-on ainsi, quel que fût le régime de propriété? La terre fumée retournée par la charrue luisante et toute belle dans sa nouvelle peau en tirait sa force pour une autre année. Les talus n’existent plus, les poteaux de granite gris sont devenus des bancs ou des supports de palissade autour de maisons trop neuves, le buis n’est que haie, les bois sculptés objets de commerce.

Une belle pelouse au pied d’un petit phare-musée descend vers la mer et rappelle aux amoureux de surfing, de pêche et de navigation, et aux amoureux tout court, que la terre derrière eux est cultivée, semée, exploitée, jusqu’aux falaises les plus sauvages, selon le désir. Nous sommes tous venus là au détour d’une μηχανή, ruse ou intrigue mais aussi moyen.

A propos de la nature et ajoutai-je des Rameaux, j’avais lu ceci dans le chapitre “les dieux de la Grèce” du livre de Pierre Hadot, Le voile d’Isis. Essai sur l’histoire de l’idée de Nature (Paris: Gallimard, 2004):

«Ne faire qu’un avec toutes choses vivantes, retourner, par un radieux oubli de soi, dans le Tout de la Nature.» C’est en ces termes que l’Hypérion de Hölderlin exprime l’extase rousseauiste. Hölderlin est ainsi, finalement, lui aussi, un témoin de cette modification de la perception de la nature, qui s’effectue au temps de Goethe et de Schelling et dont nous reparlerons plus loin. Au début du xixe siècle, la métaphore des voiles et des secrets de la nature s’efface de plus en plus, pour faire place à l’émerveillement devant une Nature sans voile, devenue désormais, selon l’expression de Goethe, «mystérieuse au grand jour», dans la nudité de sa présence. À la représentation polythéiste de la poésie traditionnelle se substitue le sentiment panthéistique d’une Nature qui, nous aurons à le redire, remplit l’homme d’un frisson sacré. (pp. 100–101)