On the quickening of time

It starts with a quote of Lévinas in the chapter “Sans nom” de Noms propres (Paris: Fata Morgana, 1976), pp. 144:

Quand les temples sont debout, quand les drapeaux flottent sur les palais et que les magistrats ceignent leur écharpe—les tempêtes sous les crânes ne menacent d’aucun naufrage. Ce ne sont peut-être que les remous qui provoquent, autour des âmes bien ancrées dans leur havre, les brises du monde. La vraie vie intérieure n’est pas une pensée pieuse ou révolutionnaire qui nous vient dans un monde bien assis, mais l’obligation d’abriter toute l’humanité de l’homme dans la cabane, ouverte à tous les vents, de la conscience. Et certes, il est fou de rechercher la tempête pour elle-même, comme si “dans la tempête résidait le repos” (Lermontov).

Mais peut-on risquer que la “morale … tout entière” de l’humanité tienne dans un “for intérieur”, un piètre havre où on ne peut s’amarrer qu’à une pauvre bosse, une petite voix intérieure subjective? C’est “le risque dont dépend l’honneur de l’homme”, dit Lévinas page 145. Et il continue: “C’est peut-être ce risque que signifie le fait même que dans l’humanité se constitue la condition juive” (souligné par Lévinas).

Il me semble qu’à la suite du judaïsme, avec le christianisme, et également dans son sillage, l’humanité est en effet “au bord de la morale sans institutions.” Depuis plusieurs siècles, surtout depuis le XVIIIème à un rythme toujours plus accéléré, le monde est en état (ou voie) de désenchantement pour parler comme Weber (et Marcel Gauchet après lui). Mais ce désenchantement ou “pealing away” d’un sentiment de sacré qui auréolait un certain nombre d’objets: institutions, personnes choisies, lieux et temps, mène peut-être—c’est un espoir—à un réenchantement plus profond, subtil et universel.